Ushuaia, le bout du monde
2h15 seulement de vol, 2000kms, pour relier Trelew à Ushuaia mais avec 1h45 de retard plus 1h avant pour l’enregistrement, ça fait déjà 5h de voyage et encore heureux que les deux aéroports soient assez proches des villes.
J’étais un peu énervé de réaliser enfin un rêve de gosse et j’avais la chance d’être à un hublot pour guetter et photographier l’arrivée.
Météo pas bien terrible à notre arrivée : un véritable temps estival local quand le vent souffle du sud (l’équivalent du vent du nord chez nous) c'est-à-dire pluie et froid (environ 5 à 6°). En allant en taxi jusqu’à notre hôtel, on découvre une ville à étages, déjà à flan de montagne avec le quadrillage des rues qui monte en terrasses. Notre hôtel est bien situé, avec une chambre superbe qui nous offre une vue à 180° sur la baie et le port.
Contrairement à la majorité des gens qui passent ici 3 nuits, 2 journées pour faire la croisière sur le canal de Beagle et un tour dans le parc national de la Terre de Feu, on a prévu 3 jours et demi pour prendre notre temps, même si on pense faire aussi les incontournables comme tout le monde, pas dans l’original ni dans l’extrême. Après notre installation, il nous reste quelques heures pour baguenauder en ville. Ce premier contact nous déçoit un peu car on découvre une grande ville faite un peu de bric et de broc, ni vraiment touristique, ni vraiment cité, avec un port de commerce assez important. On est loin de l’image bien connue des petites maisons colorées au bord de l’eau et au pied de la montagne. Le lendemain matin, comme le temps est plutôt frais et humide, on va visiter l’ancien bagne qui est devenu musée de son histoire et musée maritime. C’est en effet par des bagnards, récidivistes à de longues peines et aussi des prisonniers politiques, comme dans d’autres endroits peu hospitaliers, que la ville a été fondée. Le musée maritime nous montre, entre autres, la carte de toutes les épaves autour de la Terre de Feu …. Impressionnant.
L’après midi est prévue notre navigation sur le canal de Beagle et pour situer ce canal, c’est un passage entre l’Océan Pacifique et l’Atlantique un peu plus au sud que le détroit de Magellan. On part donc vers l’est sur un catamaran qui semble bien tenir la mer sur ces flots qui sont, paraît-il, le plus important cimetière marin du monde et, en essuyant quelques grains, on passe à côté de l’île aux oiseaux, celle des lions de mer, le phare des éclaireurs pour aller jusqu’à l’île des manchots où on a eu la chance de voir UN manchot empereur parmi des milliers d’“ordinaires” manchots de Magellan mais, pas pris en photo. Pas mal, tout ça mais ce qui est assez fabuleux, ce sont les changements météorologiques au cours desquels averses et ciel sombre alternent avec soleil et ciel bleu avec des lumières extraordinaires et, grâce à la pluie, des arcs en ciel magnifiques. Par contre, au retour, on a l’impression que tout le Pacifique veut entrer dans l’Atlantique et on retourne au port en se bagarrant (surtout le capitaine d’ailleurs mais nous on subit quand même) contre la mer … pauvre Claire qui pensait faire une croisière tranquille sur un canal comme « ch’ti d’Chin Quintin, min fieu ».
Le lendemain nous fait prendre de la hauteur … pas pour l’esprit, ça serait trop difficile pour nous mais physiquement : on décide d’aller voir le glacier au dessus de la ville, Martial de son petit nom. On grimpe d’abord un peu en taxi au rabais mais on finit tout de même par 380m de dénivelé pour avoir une vue superbe sur la ville et la baie mais sans atteindre le front du glacier, accès bloqué par la neige tombée cette nuit. On redescend quand même les 8 bornes jusqu’en ville à pied et on se dit que cette dépense physique vaut bien un p’tit resto de crabe avec un tiot coup d’blanc … Huuummm.
Notre dernier jour est également sportif : Par ce petit matin d’été austral avec du soleil et 6° au thermomètre, on va jusqu’au “Parc Naturel de la Terre de Feu” pour randonner un peu. C’est d’abord un bus prohibitif (15€ chacun, A/R quand même, pour 25kms) puis l’entrée du parc (13€ par personne) pour ahaner pendant 4h les pieds dans la boue, à monter et à descendre sans fin en longeant la baie d’abord puis en traversant un petit bout de forêt lugubre où les arbres ont des verrues et les oiseaux vivent la tête en bas … mais, pour l’effort consenti et surtout pour les superbes vues sur la baie et les montagnes autour, le jeu en vaut vraiment la chandelle même si je ne sais fichtre pas combien vaut une chandelle ici.
3 jours encore bien remplis avec des images et des sensations plein la tête, il nous faut quitter maintenant cette “finis terrae” avec un peu de nostalgie en se disant qu’on n’y reviendra sans doute jamais… dure condition que celle du touriste !
Notes culturelles :
- “Terre de Feu” parce que, en découvrant cette terre, Magellan y a vu tous les feux que les indiens Yamanas entretenaient pour se réchauffer … on les comprend.
- Les Yamanas, il n’y en a plus : décimés par les maladies apportées par les colons et exterminés, seul le pasteur Thomas Bridges avait essayé de les protéger.
- Les verrues des arbres sont une défense contre un champignon parasite, ilao ilao, et servent aux artisans locaux à fabriquer divers objets vendus aux touristes.
- La température habituelle à Ushuaia en février va de 4° à 14° et l’hiver de – 4° à 4°, il pleut assez beaucoup souvent … on sait pas si on a eu du bol ou pas.